Balade en front de mer sans mer

21 Février, Balade en front de mer sans mer.

Un texte et une photographie  d'Irène Darnau.

 

Après des jours longs de pluie de grisaille et d'instabilité.

Aujourd’hui, à Andernos, il fait un très beau temps, tout est au beau fixe.

C’est bien le printemps avant l’heure.

Au-dessus de nos têtes, très haut, s’étire un ciel bleu azur intense que traverse à la queue leu leu des vols de grues.

Partout devant, à perte de vue, des étendues de sable couleur sienne, ocre ou argentée se dévoilent en ce début d’après-midi.

Étendues de sable miroitant sous le soleil que la marée a délaissé.

L’air est clair, l’air est vif créant des couleurs franches captées par l’objectif en un piquet net et précis pour la postérité du lieu ou des selfies entre amis.

Au loin, bien loin l’horizon se devine à peine, esquissé du mystère d’une brume qui tremble et brouille les repères entre terre et ciel. La marée a vidé le bassin, comme on dit par ici.

Étrange paysage que ces terres ridées, encore un peu imprégnées d’eau, vastes étendues de vase, « crassats » parfois herbeux dont les oiseaux raffolent. Étrange paysage que ces terres parsemées de milliers de tout petits monticules de sable, petits tortillons, petits serpentins de sable enroulés sur eux même, répétés à l’infini, trahissant la présence de vers marins tout à leur fête.

Étrange paysage que cette forêt d’amarres et de bateaux penchés sur leurs quilles posés à même le sol, inutiles, ridicules ou alors mélancoliques.

En cette période de vacances scolaires, touristes, vacanciers, gens du coin sont là : flâneurs sur les bandes de sable, promeneurs sur les sentiers littoraux, contemplatifs des natures mortes, des marines grandeur nature, amoureux de bain de soleil et d’huitres.

C’est comme un air de fête.

Un temps suspendu, un temps ralenti, un temps volé à la mauvaise saison, aux rudesses de la vie, une promesse de paradis.

Comme dans mon enfance, un « tout petit » fait encore des pâtés de sable avec une impressionnante batterie d’ustensiles bien alignés, il y a de la place. Seaux en plastique de toutes tailles, aux couleurs de l’arc en ciel, en rang d’oignons qui brillent comme des lampions.

D’autres enfants courent le long de la grève imaginaire, comme libres, s’ébrouant, échappant aux adultes, les joues colorées, cheveux au vent, à la recherche des laisse de mer, s’extasiant sur leurs trésors, ivres d’espace et d’odeurs.

Il me revient en mémoire un souvenir de mes enfants jouant dans la vase et pour preuve une  photo de l’album familial  imprimant  ce moment de leurs corps roulant dans la  vase du bassin, leur faisant des visages de ramoneurs joyeux et conquérants. Quand la vase passe entre les orteils ça surprend. Tout glisse. Quel enfant du coin n'a pas fait sa bataille de vase, ça c'est de la bagarre ! Les plus belles parties ont lieu là où la vase est bien épaisse. Après tant d’efforts je me souviens d’une saine fatigue qui les a terrassés dans la voiture lors du trajet de retour vers la ville.

 

Un texte d'Irène Darnau, le 21/02/2019.

Pour la rubrique Ateliers d'écriture de l'Association À portée de mots.

1 Comment

  1. Myriam sur février 23, 2019 à 9:37

    Une bien belle évocation d’un souvenir mêlant enfance, terroir, paysage… Et quelle photo magnifique ! Merci Irène, d’avoir su saisir la magie de l’instant et de nous la faire partager de façon si sensible par l’image et les mots, Myriam

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