Se souvenir de ceux qui passent…

Il y a deux ans jour pour jour, Jacques nous quittait. Nous avions commencé à écrire ensemble le récit de sa vie, un travail resté en friche, finalisé quelques mois plus tard sous forme d’un court portrait destiné à ses proches.

Jacques était un homme libre, respectueux des autres et de leur libre-arbitre. Un homme résolument hors normes, dont la vie avait connu des hauts et des bas et qui s’était toujours battu comme un beau diable, à tel point que la maladie elle-même semblait ne pas avoir de prise sur lui tant sa détermination à lui tenir tête était forte.

Un homme qui se savait en sursis et qui voulait « transmettre ». Pour lui, le sens de notre rencontre était là : me permettre d’avancer dans mes projets de biographe, alors embryonnaires ; et lui permettre d’écrire son récit. C’était aussi simple que cela.

Je l’entends me dire de prendre bien soins de moi – il mettait toujours un « s » à soin, histoire de mieux enfoncer le clou. Comme il mettait toujours un « s » à « de vives voix » pour évoquer un échange. Je le vois sourire, taquin, m’accueillir les bras grands ouverts et me dire que « tout va bien dans le meilleur des mondes » avant de se lancer dans son récit, quand bien même nous savions l’un et l’autre qu’il n’en était rien et que le temps lui était compté ; se soucier de moi, quelles que puissent être ses propres galères et me demander, avec attention toujours, où j’en étais de mes projets.

Je m’entends lui dire ne pas avoir avancé faute de temps, et je le vois esquisser un sourire avant de pointer du doigt mes contradictions, sans jamais porter le moindre jugement ou me laisser seule face à mes choix ; me ramener gentiment à moi-même et porter sur chacun de mes projets un regard si singulier et si précieux qu’il me guide encore.

Le fait est qu’il m’a beaucoup donné. Merci.

 

Rencontres avec Jacques P.

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